Pour moi, pour les autres qui avaient vécu ce cataclysme, c’était hier !
Nous sommes minoritaires aujourd’hui et malheureusement certaines personnes qui se reconnaissent, nous disent que c’est du passé, donc il faut oublier le passé. Je me demande si eux vraiment ont oublié leur passé où ils l’ont vécu à Casablanca, Marrakech, Safi, Rabat, Oujda, Tiznit, Tata, France etc.
C’est vrai que ces gens n’ont pas vécu ce drame, ce déchirement, ce tas de souvenirs, ce que c’était Agadir avant 1960, donc nous ne sommes pas sur les mêmes ondes.
Après 50 ans, faut-il encore parler du séisme d’Agadir ? Faut-il encore faire une journée de deuil ? Faut-il rire ou pleurer ? Faut-il arrêter les pendules pour voir de près ses parents disparus, ses frères, sœurs, amis, voisins, enseignants, toubibs, nounous, patrons, épiciers, pêcheurs, ouvriers dévoués ?
« L’une des premières photos d’Agadir en 1915. Oui, c’est bien cette ville dans ses débuts et sa plage avec ses dunes de sable doré. »
« Plus tard dans les années 50 cette baie, cette plage devient comme cela pour le plaisir de tous les habitants d’Agadir. »
Faut-il brûler leurs photos, leurs documents, leurs cadeaux et leur dire tout bonnement Zut! C’est fini vos histoires, vos squelettes, le monde a bien évolué aujourd’hui.
Faut-il leur dire, s’il vous manque une pensée, une prière débrouillez-vous avec le créateur ou la nature suivant les cas, qui vous a pris à lui ?
Il est dit que les parents, les amis et tous les noms cités, sont comme des anges qui nous soutiennent lorsque nos ailes ont de la difficulté à se rappeler comment voler.
Je dis tout cela pour dire qu’avoir mal, m’a donné la force d’être plus compatissant et plus humain avec les autres aussi bien ceux disparus que ceux qui ne veulent plus penser au séisme de 1960.
Agadir est détruit par le tremblement de terre en 1960, c’est quelque chose que personne n’y peut rien. Mais, je reviens après un demi-siècle sur ces grands responsables qui n’ont pas préservé nos souvenirs qui font partis de notre patrimoine, de notre histoire. On avait injustement effacé, déraciné ce qui allait être aujourd’hui un livre vivant de ce qui étaient les quartiers : Kasbah, Founti, Talborjt, Yachech.
Moi et mes semblables ne les pardonnent pas !
« Cette mosquée mérite t-elle son élimination ? Ne mérite t-elle pas de rester là comme Volubilis, Tour Hassan, Koutoubia, Chellah, Granada et autres ? Ces anciennes maisons marocaines à côté de cette mosquée ne devraient être pas préservées pour notre histoire ? »
« Le premier appontement d’Agadir ouvert en 1916 ne devrait –il pas être épargner par un effacement ? »
« Ce tronçon de Founti, sa murette et sa route de Mogador ne devraient pas être préservés pour notre tourisme ? »
« Une vue aérienne d’Agadir en 1950. Un panorama extraordinaire avec le port en arrière plan. Les chalets sont aussi là . Le fer à cheval est très visible »
En 2007, on continue encore à détruire les quelques vestiges restantes d’Agadir d’avant 1960 par exemple en ville nouvelle près de l’hôtel Marhaba, l’ex-Tout Va Bien, aussi près de l’école Gauguin. On veut détruire le cinéma Salam, la belle soucoupe ex-douane au port qui est abandonnée et livrée « aux martiens » qui viennent parait-il, se rafraîchir là .
Nous avons bien peur que demain, on utilisera l’argument de modernisme, pour faire disparaître toutes traces de cette Agadir d’avant le séisme. Il se peut que cela arrive car les textes ne sont pas là pour l’interdire. Des textes qui protègent ce patrimoine d’Agadir.
« Il faut préserver ce patrimoine et qu’il devient un grand musée particulier »
« Quelle architecture ! Quel bel immeuble ! »
« Ce n’est pas un sauvetage des emmurés du séisme que vous voyez sur cette photo mais bel et bien la destruction d’un vestige d’Agadir tout récemment en 2007 !!! »
« Voici ce qui est fait à sa place avec ses rideaux grinçants …Commentez SVP ! »
Ce pauvre type maladroitement élu et qui s’est permis de signer le dossier de la destruction de ce vestige, de ce patrimoine doit être poursuivi pour savoir les raisons qui l’ont poussé à commettre cette bavure impardonnable .Toute Agadir doit le connaître, le savoir.
Que nous allons raconter et montrer à nos enfants, à nos petits enfants, à nos visiteurs, à notre HISTOIRE ?
« Voici ce vestige détruit dans une photo prise en 1956 »
Reconstruire « des dortoirs » à perte de vue et à une vitesse inouïe, n’est pas une très bonne solution qui fait le bonheur de bien vivre.
Nous voulons une construction anti-sismique oui, puisqu’on est au dessus de fissures sismiques. Nous souhaitons une touche marocaine pour qu’on sache, qu’on est bien au Maroc et à Agadir la perle du Souss (son ancien logo dans les cartes postales)
Nous voulons montrer au monde que nous avons nos spécificités, nos pierres taillées, nos fenêtres en arcades, nos tuiles verte et ocre, notre espace, nos artisans, notre état d’âme tout court.
Jamais ces immeubles genre Nantes, Nice, Cannes, Miami, new-York, ne perpétueront « l’homme » à la djellaba, aux babouches, au turban lors de ses fêtes et cérémonies. Aussi la belle femme berbère avec tous ses habits traditionnels et multicolores .Le henné aux mains et aux pieds, le Khôl aux yeux qui vous font rêver. La fibule et les bracelets qu’on ne trouve que dans cette partie du monde. Aussi le gnaoui majestueux, le Raiss et Raissa, le guerrier de la fantasia au koumya, ce poignard en argent ciselé. Je ne dis pas illettrés, ni non émancipées.
Parmi les retards que nous avons à rattraper est celui de mettre à la disposition des jeunes des lieux en quantité pour s’épanouir, pour dépenser leurs énergies accumulées, pour devenir des champions sportifs au lieu d’occuper la rue pour ses déviations multiples et provoquer les nuisances qui dérangent la quiétude des petits et des grands.
Aussi des lieux appropriés pour nos femmes afin d’apprendre davantage, au lieu de s’adosser aux murs des bâtiments par groupe et suivre le coucher du soleil.
Nos hommes retraités ont besoin d’espaces pour oublier le défi d’âge et pour se maintenir au lieu de jouer aux cartes et dames par attroupements visibles dans les quartiers sous les murs.
Nous souhaitons que chaque quartier ait un lieu pour célébrer les mariages et autres pour éviter de planter des « guitounes » dans les rues, avenues et empêcher banalement la circulation sans parler des nuisances sonores jusqu’à l’aube.
Agadir est une jeune ville de moins de cinquante années, la fluidité de circulation pose un réel problème aux heures de pointe et pendant les vacances d’été.
Le souk qui a monopolisé tout dont on a besoin pose un vrai problème d’encombrements dans tout son environnement.
Cet état négatif n’est pas une critique gratuite, c’est un constat d’état de lieux que les gadiris et autres se disent journalièrement.
Faut-il dire que ces décideurs, ces penseurs, ces architectes, ces ingénieurs avaient loupé le coche déjà au départ de la reconstruction ? N’ont-ils pas pensé par exemple qu’en 2010 la population sera de tant d’individus, et tant d’engins qui chercheront à rouler ? Ne savent-ils pas qu’un jour on passera au tramway pour éviter la pollution, donc son espace, son alimentation, ses arrêts aisés. N’ont-ils pas pensé au ramassage des ordures aussi bien ménagères que celles des jardins ?
Des gens dynamiques, assidus sont à la mairie aujourd’hui, mais comment s’y prendre dans tout ce gros fardeau léguer par les précédents ? Je dirais par ces 50 années ? Cette équipe de la mairie va-t-elle s’occuper de corriger financièrement tous ces innombrables problèmes cités ou s’occuper de l’avancement de la reconstruction de la ville ?
La reconstruction d’Agadir va bien vite, très vite et les problèmes avec.
Pour ce cinquantenaire justement, nous voulons que notre ville d’Agadir soit une ville touristique et non seulement, une station balnéaire.
Pour qu’elle soit une ville touristique la seule alternative est de réhabiliter la citadelle « la kasbah » pour que des millions de visiteurs viennent la voir comme le Mont St Michel en France par exemple. Cette kasbah bien reconstruite pourra donner beaucoup plus que les autres établissements. Elle rehaussera à coup sûr les chiffres d’affaires des installations hôtelières.
Founti réhabilitée et je la vois avec un aquarium longitudinal, abritant toutes les espèces de nos poissons spécifiquement du sud marocain. Les ingrédients sont tous à côté pour faire des entrées financières fantastiques.
Talborjt réhabilitée et je la vois avec un télésiège de curiosité qui fait monter à la kasbah.
Reconstruire à son centre par exemple cette place Lahsen Tamri, ce cinéma Rex pour abriter le musée de Talborjt.
« Belle image d’antan de ce quartier Talborjt place Tamri. »
Nous entendons que les immobiliers aux longues griffes veulent se l’accaparer.
Revaloriser ce quartier avec ses jardins botaniques pour servir d’un lieu de relax à la population et servira en même temps d’un lieu de détente naturelle pour nos visiteurs âgés qui recherchent en hauteur la baie iodée. C’est la meilleure solution souhaitée par toute la population d’Agadir.
Yachech réhabilitée et je le vois être un détour touristique avec son Robinson de 1920, son musée, ses deux fontaines, son pont, sa place genre Jamâa El Fenna aux mûriers et qui raconte son histoire typiquement marocaine. Ce quartier avec ses 7000 habitants, était le réservoir d’hommes et femmes bâtisseurs, peintres, menuisiers, ferronniers, jardiniers, ouvrières d’usines de conserves et les nounous douces et aimables.
Il faut restaurer l’authenticité du sud marocain à Agadir que les gens aiment, surtout les touristes en général puisqu’on veut être une ville phare, touristiquement.
Agadir a besoin après 50 ans d’un véritable grand musée documenté qui montre et qui explique l’histoire de cette ville.
Cinquante ans après je rêve, dit-on, mais je ne rêve pas. J’y crois aux bonnes réalisations de cette Ville. C’est un état des lieux, une espèce de bilan qu’on doit revoir courageusement et toucher de près.
Ces équipes actuelles, ses hommes sérieux qui ont la destinée de la mairie sauront relever tous ces défis.
Je le fais savoir tout simplement aussi aux bonnes volontés, aux différents responsables de tout bord, aux hommes gadiris qui ont le cœur et le pouvoir d’agir.
Je le rappelle pour cette occasion de la commémoration…Un demi-siècle après le tremblement de terre du 29 février 1960 à 23h 45.
« Photo panoramique d’Agadir qui va vite, vite dans sa Reconstruction. Prise de vue par moi-même le 24 février 2010 »
Lahsen Roussafi
